Je souhaite dans ce bref article présenter le point de vue de la psychosomatique intégrative, interreliant un modèle de fonctionnement psychique, la médecine et les neurosciences à propos de cette médecine dite intégrative : L'être humain est une unité psychosomatique.
La santé ou médecine intégrative, créée dans les dernières années, intègre à côté de la médecine, la thérapie psychocorporelle et d'autres formes de thérapie en s'imaginant qu'ils soignent ainsi un peu mieux les patients.
Ces confrères médecins ignorent que voici plus de 35 ans le Docteur Pierre Marty, créateur de l'institut de psychosomatique de Paris, avait déjà développé dans le cadre des thérapies de patientes et de patients somatiques une approche combinant une thérapie psychosomatique avec la thérapie psychocorporelle dans les cas de patients en grande difficulté psychique.
En tant que Président de l'Ipso, j'ai poursuivi à la mort de mon maître et ami Pierre Marty, cette recherche scientifique pour aboutir à un nouveau modèle de fonctionnement de l'esprit dans la relation au corps malade. J'ai enseigné ce modèle à la faculté de médecine de la Pitié-Salpêtrière pendant 10 ans, et je poursuis, à l'heure actuelle, cet enseignement dans le cadre de l'institut de psychosomatique intégrative. En effet en présence de patients somatiques dépourvus d'imaginaire, de capacités associatives, et de névrose infantile, il était important de développer un modèle et d’aider ces patientes et patients grâce au système psychique à les protéger des troubles somatiques aux côtés du système immunitaire.
Les médecins poursuivent avec beaucoup de naïveté leur projet " magnifique » de santé intégrative qui ne fait à aucun moment appelle à un modèle de l'esprit dans la relation avec le corps. Ils oublient complètement que les défenses mentales constituent un système de défense aux côtés du système immunitaire. Le renforcement des défenses mentales protège les êtres humains des maladies et de leurs formes graves.
Mes collègues et moi-même nous nous tenons à la disposition de nos confrères médecins et thérapeutes pour leur communiquer nos recherches afin qu'ils puissent mieux soigner les patientes les patients dans le cadre de leur pratique de « santé intégrative ».
Jean Benjamin Stora
Dr L. NACCACHE Algologue, Psychosomaticien.
Un grand nombre de Médecins rejoignent leurs patients dans le constat suivant : l’approche de l’individu somatiquement malade tend à s’installer dans le paradigme du « corps détaché de l’homme », ou tout aussi bien de « l’homme détaché de son corps » ainsi qu’élégamment formulé dans l’ouvrage «L’homme douloureux » (Simonet G. Laurent B. Le Breton D., « L’Homme douloureux », Paris, Ed. Odile Jacob ; 2018). « La maladie est posée comme une espèce biologique détachée de l’homme singulier qui en souffre et étudiée à part sur un corps dissocié de l’homme ».
Nous voudrions partager certaines pensées de cet ouvrage dans le but de défendre l’extension multidisciplinaire de l’investigation et de la prise en charge des patients somatiques à l’approche Psychosomatique Intégrative proposée et développée par le Pr J.B. Stora au GHU de la Pitié- Salpêtrière.
En effet, le « socle épistémologique de la médecine contemporaine repose sur l’étude rigoureuse du corps, mais d’un corps isolé de la personne, et perçu comme réceptacle d’une maladie. Le dualisme méthodologique qui sépare l’individu de son corps, nourrit encore de nos jours les pratiques et les recherches de l’institution médicale en poursuivant son affinement mécanistique vers la biologie moléculaire et l’imagerie cérébrale ».
«Pour mieux la comprendre, la médecine réduit la maladie à la biologie, elle la dépersonnalise. Celle-ci n’est pas perçue comme liée à l’héritage de l’aventure individuelle d’un homme situé et daté, mais comme la faille d’une fonction ou d’un organe. L’homme est atteint d’une altération qui ne concerne que son organisme (...) ce n’est pas l’humain qui est malade mais l’organisme ».
Ces principes directeurs constituent indéniablement « la limite d’une médecine qui n’est pas centrée sur le sujet mais le recours à un savoir du corps qui oublie l’homme souffrant et considère sa plainte avec indifférence car elle ne concerne pas directement le diagnostic ».
« Dans l’élaboration graduelle de son savoir et de son savoir-faire, la médecine a négligé le sujet et son histoire, son milieu social, son rapport au désir, à l’angoisse, à la mort, aux autres, les conditions de son émergence, le sens de la maladie aux yeux de l’individu qui en est affecté ».
Pour autant, les auteurs de l’ouvrage considèrent « l’idée psychosomatique ... comme le cache-misère conceptuel d’un reliquat de dualisme qui psychologise le symptôme ».
Or cette dernière réflexion se trouve notoirement réfutée par le modèle de la Psychosomatique Intégrative (PSI) qui n’a rien à cacher mais plutôt à se faire savoir. Et qui cherche à penser l’homme malade dans le paradigme d’un continuum corps-esprit ou aussi bien soma-psyché.
Poser un individu non clivé passe nécessairement par le fait de le penser comme unité psychosomatique où le psychisme se trouve intégré à l’économie de l’homéostasie globale. C’est précisément le cadre de la Théorie des cinq systèmes, élaborée par le Pr J.B. Stora.
Car ré-attacher l’homme à son corps malade nécessite au moins deux axes de pensée.
Le premier concerne la recherche des agents médiateurs qui « biologisent » et « mentalisent » les rapports de continuité entre phénomènes psychiques et phénomènes somatiques. Et particulièrement les inter-relations entre système nerveux central et système psychique.
Le deuxième axe concerne la possibilité de penser la subjectivité d’une façon non réduite à ses aspects cognitifs et comportementaux. Cela nécessite assurément de l’intégrer dans son aspect métapsychologique, autant que biologique, sociologique, culturel et biographique. Il s’agit, en effet d’étendre le sujet dans ses dimensions affectives, imaginaires, conflictuelles, relationnelles et traumatiques ainsi que celles de ses croyances et de ses ressources.
En proposant une grille d’investigation du fonctionnement mental, la PSI permet l’extension multidisciplinaire de l’évaluation du patient somatique ; et le cas échéant offre la possibilité d’une prise en charge psychothérapeutique psychosomatique complémentaire. Puisqu’il s’agit de « soigner les malades et pas seulement leurs maladies » selon l’expression appropriée du Pr J.B. Stora dans le sous-titre de son ouvrage « 15 cas de Thérapies psychosomatiques », Paris, Editions Hermann, 2019.